« Trait pour trait » : Catherine Maunoury championne du monde de voltige aérienne

Un regard bleu ciel, des mèches blondes virevoltantes. Elle évolue dans le ciel avec la maestria d’un oiseau. Deux fois championne du monde de voltige aérienne, dix fois championne de France, sans compter de nombreux titres internationaux, vedette des meetings, Catherine Maunoury ne s’est jamais départie de son naturel et de sa simplicité.

Sa passion commence alors qu’elle à 8 ans : son père, médecin en Bretagne et pilote privé, l’emmène voler avec lui à l’aéroclub. Cette révélation devient aussitôt fascination : « La nécessité de voler , et de voler absolument, d’aller jusqu’au bout m’est apparue comme une évidence ». A 17 ans elle obtient son brevet de pilote. Mais, étrangement, une appréhension subsiste. Très vite, elle comprend que seule la maîtrise parfaite de l’avion lui permettra de la dépasser. Encouragée par ses moniteurs, elle se lance dans la voltige et se montre particulièrement douée. Elle aime à citer Jonathan Livingstone, le goéland, comme son initiateur. « Son unique chagrin, il ne le devait pas à la solitude, mais au fait que les autres goélands ne voulaient pas croire à la gloire du vol, au fait qu’ils se refusaient à ouvrir les yeux et à voir ». Pourtant, à ce moment là , elle ne songe pas à faire une carrière sportive. D’autres questions se posent à elle pour trouver un sens à l’existence, « échapper à l’absurde, à l’incompréhensible , à l’inadmissible». Elle entreprend des études de philosophie et envisage l’enseignement. Après sa maîtrise, elle entre à Air France en tant qu’hôtesse de l’air, pensant n’y rester que 6 mois. Mais le rêve d’Icare l’habite toujours. . Voler se révèle comme une réponse à son désir d’absolu « une façon de s’affranchir de la pesanteur et de la mort, de ne pas plier devant les contingences de l’existence ».

C’est alors que passion se met à rimer avec compétition. En 1980, Catherine Maunoury obtient son premier titre de championne de France et en 1988 le premier de championne du monde. Ce n’est plus là une simple affaire de pilotage, c’est « la jubilation totale d’utiliser à fond les 3 dimensions, de jouer avec ». Et aussi une performance physique, car l’organisme st soumis à des accélérations qui peuvent aller jusqu’à 10g. Son mari, Dominique Maunoury, architecte, pilote et peintre de l’air, aujourd’hui disparu, sait ce qu’il y a d’irréductible dans cet élan et pressent que les prodiges de son épouse ne font que commencer. Pour la naissance de leur premier fils, Grégoire , il lui offre un avion- un cap 21 en kit qu’il monte avec deux amis. La jeune femme entame alors une course aux médailles qui durera 20 ans et la conduira souvent en haut du podium. En 1989, elle reçoit le prix Icare, qu’elle est la seule femme à partager avec Jacqueline Auriol.

Perfectionniste à l’extrême, elle se défend d’être casse-cou. Sa spontanéité, sa pétulance, se doublent d’un sens du dépassement de soi qui la pousse à se lancer de perpétuels défis. Mine de rien, la quête d’absolu est toujours là, en profondeur. Avec cette authentique modestie qui lui fait prendre le risque de perdre autant que celui de gagner. A la fin des année 90, elle détient un palmarès inégalé et pourrait cesser la compétition. Mais, quel serait le sens d’abandonner sans tenter une nouvelle fois le championnat mondial ? Pour réussir, il lui faudra être plus irréprochable que jamais, car ses succès et sa notoriété lui ont taillé une réputation redoutable et rien ne lui sera pardonné. Est ce toujours la leçon de Jonathan Livingstone qu’elle cite parfois : « Le paradis n’est pas un espace, et ce n’est pas non plus une durée ans le temps. Le paradis, c’est simplement d’être soi même parfait ». Le 20 août 2000, elle est une deuxième fois sacrée championne du monde.
Entre temps, l’heure est venue de commencer à transmettre son expérience. Ce qu’elle commence à faire. Libérée des contraintes de la compétition, maîtrisant parfaitement la technique de la voltige, elle développe désormais les ressources que lui réservaient sa créativité. Elle songe à cet autre maître qu’est Gaston Bachelard : « Imaginer, c’est s’absenter, c’est s’élancer vers une vie nouvelle ». Devant ses admirateurs émerveillés, Catherine Maunoury danse dans l’azur avec la grâce d’une ballerine. Ses évolutions tracent dans l’espace d’immenses dessins où l’imaginaire rejoint cet infini qui la fascine toujours.

Source : Portrait dans Le Figaro d’Elisabeth Mismes Thomas